Algérie: démocratie, où es-tu ?
Pour la énième fois depuis l’indépendance, il y a presque un demi-siècle, l’Algérie est de nouveau engagée dans un processus de réformes politiques. Leur répétition, souvent très largement infructueuse, ne serait pas sujette à questionnements s’il ne s’agissait que d’actualiser ou compléter les règles sur lesquelles sont basées l’organisation et le fonctionnement des institutions politiques et définies leurs relations réciproques. Mais est-ce bien le cas du processus de réformes en cours ? Personnellement, j’en doute fort pour les raisons suivantes :
1. Les constitutions de 1963 et 1989 – celle de 1976 ne comptant pas car très inspirée des constitutions excessivement idéologiques et sans grande utilité pratique en vogue à l’époque en ex- Union soviétique et chez ses satellites d’Europe de l’Est – ont sombré toutes les deux à la première crise politique rencontrée par le pays :
- Pour la première, avec les luttes violentes pour le pouvoir déclenchées après l’indépendance et conclues par le coup d’état de juin 1965 ;
- pour la deuxième, avec le mouvement insurrectionnel lancé par la mouvance islamiste, voulant profiter des opportunités offertes par l’ouverture démocratique post octobre 1988 pour mettre en place par tous les moyens un régime totalitaire.
2. Les pratiques autocratiques des groupes dirigeants caractérisées par la tendance des pouvoirs exécutifs successifs à phagocyter totalement les pouvoirs législatif et judiciaire.
3. L’absence de véritable alternance politique, étant donné que les changements du personnel politique, y compris au sommet du pouvoir, se font toujours suivant le mode de la cooptation clanique, régionaliste et familiale.
4. La pratique politicienne de la tromperie et du camouflage par des réformes limitées aux façades ou apparences dans le but, d’une part, de tromper et endormir les algériens et, d’autre part, donner à la communauté internationale l’impression que ses exigences en matière de bonne gouvernance et de respect des droits humains sont satisfaites ou du moins commencent à l’être.
La suffisance et la vanité aux commandes de l’Etat
Aux facteurs négatifs exposés plus hauts, s’ajoute la méthode de travail utilisée par la commission chargée de procéder aux consultations des différentes forces et personnalités politiques, économiques et sociales au sujet des réformes projetées : ces dernières se présentent devant la dite commission pour exposer leurs propositions tels des élèves à un oral d’examen ou bien des chercheurs d’emploi à un entretien d’embauche ( !?). Ce qui est significatif des a priori sous tendant cette façon de faire : ainsi les dirigeants actuels qui, de par leur position aux commandes de l’Etat, sont les premiers responsables de la crise (oui, je dis bien « crise », car, sinon, pourquoi des réformes politiques ?) ont manifestement la prétention de se considérer comme les plus capables d’en sortir le pays (!?). Dans ces conditions, il n’est pas étonnant de voir les courants politiques bien ancrés dans la société rejeter clairement cette initiative présidentielle dont l’audience et la crédibilité se trouve ainsi sérieusement limitée dès le départ.
La voie royale des réformes démocratiques
Si le but recherché est vraiment d’œuvrer à la réussite de réformes politiques de fond, il est important de traiter sur un même pied d’égalité tous les acteurs présents sur le terrain, qu’ils appartiennent au pouvoir ou à l’opposition. Pour cela, l’une des deux méthodes pourrait être utilisée :
- soit créer, par décision présidentielle, une commission nationale électorale indépendante chargée d’organiser du début à la fin l’élection d’une assemblée constituante souveraine, laquelle rédigera et votera non seulement le texte d’une nouvelle constitution pour la république mais aussi les lois subséquentes destinées à servir d’appui à la démocratisation du champ politique (lois sur les partis, les élections, la presse, etc.)
- Soit créer, toujours par décision présidentielle, une commission nationale indépendante, représentative de tous les courants politiques du pays (à l’exception, toutefois, de ceux recourant à la violence ou la prônant), chargée d’élaborer le contenu des réformes politiques à engager, en particulier un projet de nouvelle constitution ou bien des amendements à celle actuellement en vigueur, et définir les différentes opérations – notamment électorales – qui en découlent – ainsi que les méthodes et le calendrier de leur réalisation.
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