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Le ventre de l’architecte (The Belly of an Architect ), réalisation et scénario de Peter Greenaway. l’Eternel et l’Ephémère

            The Belly of an Architect (Le ventre de l'architecte), film dramatique, réalisation et scénario de Peter Greenaway, Royaume-Uni, 1987, durée 1h58mn, avec Brian Dennehy (Stourley Kracklite),  Chloe Webb (Louisa Kracklite), Lambert Wilson  (Caspasian Speckler), Sergio Fantoni (Io Speckler ), Stefania Casini (Flavia Speckler), etc.

           

Synopsis : Un architecte américain est invité à Rome pour réaliser une exposition sur une de ses idoles, l'architecte visionnaire français Etienne-Louis Boullée. Stourley Kracklite arrive avec sa charmante épouse Louisa. Obsédé par son travail, il souffre de maux de ventre et devient paranoïaque tandis que sa femme se tourne vers un jeune architecte italien.

Voilà l'œuvre d'un esthète,  pleine de ces significations abstraites de l'Art souvent situées sur des cimes difficiles à atteindre mais jamais inintéressantes à visiter. Cette appréciation ne devrait pas être comprise comme une intention de minimiser d'entrée la valeur de l'œuvre de Peter Greenaway. Elle est juste destinée à tenter de définir en quelques mots  sa vision.

Le film a pour premier sujet, l'Art en général, l'Architecture en particulier et la sculpture et la photographie,  accessoirement. Il est lui-même bâti sur le modèle de l'œuvre  ou plutôt de l'anti-œuvre  d'architecture : en effet, la base de la première est l'idée d'équilibre tant physique qu'esthétique, celle de la seconde, c'est-à-dire de l'intrigue du film, est son opposé, le déséquilibre entre les personnages et les rapports (déséquilibrés) qui en résultent.

Le  déséquilibre à l'origine de dérèglements dans la vie des personnages et de leurs rapports  repose sur les écarts d'âge entre les principaux protagonistes de l'histoire qui sont au nombre de trois : l'architecte quinquagénaire, Stourley Kracklite, son épouse, Louisa, qui à l'âge de sa fille et le jeune architecte italien, Caspasian Speckler,  son rival. Premier déséquilibre.

Le couple d'américains (avec la précision que  Louisa est de parents d'origine italienne) est venu de Chicago – une ville neuve, presque sans histoire dirions-nous - diriger la préparation d'une exposition consacrée à l'architecte classique français Etienne-Louis Boullée à Rome – la ville éternelle, qui fut une cité – monde pour reprendre l'idée de Fernand Braudel. Second déséquilibre.

           L'histoire du film, qui est surtout celle des rapports de l'architecte, Stourley Kracklite, de sa jeune et belle femme, Louisa, et de l'architecte romain aux dents longues,Caspasian Speckler, se déroule dans un permanent voisinage entre deux dimensions de notre  monde qui sont, d'une part, la vie quotidienne des gens avec ses aléas ( précarité des liens amoureux et des êtres aussi, exprimée par les liaisons adultérines et la maladie) et la pérennité de l'Art avec pour théâtre de représentation, Rome, et pour modèle d'homme « immortel », l'architecte Etienne-Louis Boullée.

Empêtré dans ses ennuis de santé, qui vont le séparer en quelques mois de sa femme et l'empêcher de garder jusqu'à son terme la direction de son projet d'exposition, Stourley Kracklite, s'enfonce dans une paranoïa qui lui fait soupçonner celle-ci de l'empoisonner à très petite dose. C'est une fois le diagnostic de sa maladie rendu par un médecin, à savoir une tumeur cancéreuse à son stade terminal, qu'il se libère enfin, la mort apparaissant proche, des contingences de l'existence et engage ce qui lui reste d'énergie pour faire le grand saut dans la dimension de l'Art comme, le croit-il,  voie d'accès  vers l'éternité. Ainsi, le jour même de l'inauguration du projet dont la direction lui a été enlevée par les bailleurs de fonds suite aux intrigues de son peu scrupuleux rival, il organise sa disparition en se jetant du haut de l'édifice alors que, au  même instant, son ex-épouse enceinte de lui met au monde leur enfant en pleine cérémonie inaugurale (toujours l'idée d'équilibre : le père meurt, son enfant naît. N'est-ce pas aussi une forme d'immortalité, cette continuité des générations ?). De cette manière, c'est-à-dire par effraction et avec fracas, il espère pouvoir entrer dans l'éternité de l'Art en intégrant à la fois l'histoire d'une merveille d'architecture et celle d'un grand architecte, dont la présence, matérielle pour l'une et immatérielle pour l'autre, résiste à l'usure du temps.

 



12/01/2012
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