20 août 1955 et 1956, des jalons vers la victoire
60 ans après, les idéaux de novembre 1954 sont toujours d’actualité. Il est vrai que dans la vie d’une nation, soixante ans ne représentent pas une longue période, même si, à notre époque, le temps s’accélère, dit-on, et des pays entiers voient basculer leur destin en quelques années, voire quelques mois. Par contre, soixante ans dans la vie d’une personne représentent une plus longue période, l’équivalent de trois générations entières. D’où la nécessité d’intéresser les jeunes générations d’algériens et d’algériennes à la connaissance de l’histoire de notre pays, notamment la lutte contre l’occupation coloniale.
A l’opposé de certaines méthodes assez répandues, l’enseignement de l’histoire doit, pour être efficace, éviter l’a priori idéologique et politicien. Ce dernier consiste à imposer des lectures sélectives et des points de vue orientés sur les événements, suscitant ainsi chez les destinataires soit une vision mythifiée sur des faits et des acteurs idéalisés, soit, à l’inverse, une réaction de scepticisme, sinon d’incrédulité. Au vu de ce constat d’insuffisance en matière d’enseignement de l’histoire, il est plus que souhaitable d’agir dans plusieurs directions afin d’améliorer progressivement les résultats dans ce domaine en:
- développant la recherche historique tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays ;
- facilitant l’accès aux archives (tant privées que publiques) nationales ou étrangères, notamment françaises, pour la période coloniale et la guerre de libération nationale ;
- introduisant des modules complets d’histoire dans la formation des enseignants ;
- encourageant, au niveau de l’édition et des médias audio-visuels et numériques, la création de revues et émissions historiques avec la collaboration de spécialistes reconnus.
- élaborant pour les établissements scolaires des programmes et des manuels d’histoire adaptés.
Il suffit de présenter l’épopée de la guerre de libération nationale de la façon la plus proche possible de la vérité, avec les forces et les faiblesses des moudjahidine et moudjahidate, pour convaincre avec cœur et intelligence de l’importance majeure du 1er novembre 1954 en tant qu’événement fondateur dans le long et douloureux processus de renaissance de la nation et de l’Etat algériens. Le 1er novembre 1954 s’inscrit effectivement dans un mouvement historique à caractère universel, celui de la fin des empires coloniaux. A l’intérieur de ce mouvement de portée mondiale, son importance d’acte inaugural de la guerre de libération nationale est telle qu’il a ouvert le passage à un rythme accélérée à l’indépendance des colonies françaises, en particulier en Afrique du nord et du sud Sahara.
Préalablement à sa dimension internationale, le 1er novembre 1954 s’inscrit d’abord et surtout dans la dynamique interne du mouvement national, dans lequel il ponctue la séquence de fin de la lutte pacifique et celle du commencement de la lutte armée.
L’impasse dans lequel s’est trouvé bloqué le mouvement national, plus précisément le courant indépendantiste du PPA-MTLD est principalement le fait du système colonial qui a :
- sous-estimé la portée des manifestations pacifiques du 8 mai 1945 et les séquelles profondes des massacres qui les ont réprimées dans la mesure où les timides réformes concédées ont été entachées par des fraudes électorales massives destinées à barrer la route aux candidats du PPA –MTLD ;
- laissé s’aggraver durant la même période (1945- 1954) les conditions de vie de la population algérienne, en particulier la paysannerie, largement majoritaire, plus que jamais paupérisée par le chômage, le sous-emploi, la chute du pouvoir d’achat et l’exode rural.
Cette impasse historique a entrainé une crise au sein du PPA- MTLD exprimée par le conflit de leadership entre Messali, le chef du parti, et ses partisans, d’un côté, et les membres du comité central (« les centralistes »), de l’autre.
Finalement, ce sont des militants de l’organisation spéciale (OS), la branche militaire clandestine du PPA-MTLD, qui ont trouvé l’issue à l’impasse en déclenchant la lutte armée, donc en prenant la direction politique et militaire de la guerre sous la bannière du FLN- ALN.
Sans prétendre être exhaustif, les enseignements que les générations présentes et futures peuvent tirer du 1er novembre et des événements dont il a été le déclencheur sont très succinctement les suivants :
1/ les dirigeants du FLN-ALN ont longuement préparé les conditions de réussite de leur choix stratégique : parfaite connaissance du terrain et de l’ennemi, entrainement des hommes, familiarisation avec les techniques de guérilla et avec d’autres expériences de guerres des partisans, stratégie d’alliances internationales en direction des pays arabes et musulmans, des pays du tiers-monde et de l’opinion publiques des pays occidentaux, y compris de la France.
2/ En phase opérationnelle, les dirigeants du FLN- ALN ont su synchroniser l’action militaire avec l’action politique en vue de les utiliser pour les renforcer mutuellement. Prenons pour exemples les deux événements dont l’anniversaire tombe un 20 août :
- l’offensive générale du 20 août 1955 déclenchée dans le nord constantinois avait pour double objectifs, en premier lieu, de soulager les régions de l’Aurès et de Kabylie de la pression ennemie et, en second lieu, d’exprimer la solidarité avec le Maroc dont le roi Mohammed V était exilé à Madagascar par les autorités coloniales.
- Le congrès de la Soummam, tenu le 20 août 1956, avait notamment pour objectifs d’affiner la stratégie de lutte au plan militaire et politique et de renforcer l’organisation sur la base du bilan des mois de guerre écoulés.
Les objectifs de la Déclaration du 1er novembre restent en bonne partie à réaliser. Ces objectifs, parmi lesquels figure celui de « la restauration de l’Etat algérien souverain, démocratique et social dans le cadre des principes islamiques », requièrent un grand engagement des jeunes générations sur le modèle des hommes et des femmes dont le courage, l’intelligence et le désintéressement doivent rester pour toujours dans nos mémoires et inspirer nos actions.
Mohand Ouamar Benelhadj.
Article paru dans la revue "Premier novembre" n°180 du mois de novembre 2015, éditée par l'Organisation nationales des moudjahidine (ONM)
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